Dans le cadre du Programme de neutralisation des eaux de drainage dans
l'environnement minier (NEDEM), les répercussions de l'élimination subaquatique
de résidus miniers dans le lac Anderson au Manitoba ont fait l'objet d'une
évaluation sur le terrain. Depuis 1979, environ 7,5 million de tonnes de résidus
miniers ont été déversés dans ce lac par l'usine Snow Lake exploitée par la
Compagnie minière et métallurgique de la Baie d' Hudson Ltée . Cette usine sert au
traitement du minerai de cuivre/plomb/zinc tiré de sept mines souterraines du
voisinage. Les résidus sont rejetés dans le lac au moyen d'un tuyau flottant, qui est
déplacé régulièrement de façon à empêcher leur accumulation.
Ce lac, qui est une petite pièce d'eau du Bouclier précambrien, possède une activité
biologique élevée (les conditions y sont mésotrophes ou eutrophes). Il y a
longtemps qu'il est considéré comme mort vu le peu de poissons qu'on y rencontre.
Le renouvellement de ses eaux est nul car il est entouré de terres et les débits
d'entrée et de sortie sont minimaux. À la sortie du lac, on a construit un barrage
permettant d'en régler le débit, ce qui a augmenté sa superficie. Toutefois, la
sédimentation des résidus miniers a entrainé une diminution de son volume global.
Ce lac est peu profond: en moyenne, 2, 1 m et au maximum, 6,7 m. Aucune
thermocline n'a été observée dans la colonne d'eau, mais on a noté que la
concentration d'oxygène dissous augmentait d'une façon marquée à 0,5 m du fond.
Depuis qu'on a commencé d'y déverser des résidus miniers, ce lac se distingue des
autres par une conductivité, des concentrations de matières solides dissoutes et de
sulfates, et une dureté accrues; son pH a, en général, baissé; les concentrations de
métal dissous et la turbidité ont augmenté près de la sortie. Les eaux provenant de
la zone de la mine Anderson sont caractérisées par un pH bas, une conductivité
élevée, une faible alcalinité et de fortes concentrations de matières solides
dissoutes, de silicates réactifs de sulfates et de métaux dissous, et des
concentrations de chlorures supérieures.
Les concentrations de métaux dans les sédiments lacustres ont beaucoup augmenté.
Au poste d'échantillonnage situé près de la décharge, les teneurs en métaux des
sédiments sont comparables à celles des échantillons de résidus miniers frais. Aux
postes où les dépôts miniers datent de longtemps, une couche organique
biologiquement active est en train de se former. Des études pétrographiques et des
analyses détaillées ont été effectuées pour caractériser les sédiments et les résidus
miniers tant par diffraction que par fluorescence des rayons X (DRX et FRX) et
aussi bien d'après la taille des particules que les constituants des lixiviats.
Les sédiments ont été répartis en deux groupes principaux: ceux constitués surtout
de matières appartenant aux résidus (les résidus eux-mêmes et les échantillons
prélevés aux postes l, 2 et 4) et ceux composés principalement de matières
organiques (postes 3, 5 et 7). Des études par DRX ont montré des teneurs plus
élevées en quartz, en feldspath, en pyrite, en micas et en calcite dans les
échantillons constitués surtout de résidus. Les résidus eux-mêmes se composaient
de pyrite (55 %), de pyrrhotite (4 %), de sphalérite (2 %) et, en faibles proportions,
de hornblende, de biotite, de chlorite, de carbonates et d'autres types de silicates.
On a aussi trouvé de faibles quantités jusqu'à des traces de chalcopyrite,
d'arsénopyrite et de galène. L'évaluation des quantités de résidus présentes dans les
échantillons organiques varient selon la méthode d'analyse utilisée. Les
échantillons organiques renfermaient de la pyrite framboïdale et de fins grains de
pyrite angulaire. Quant aux échantillons constitués surtout de résidus, leur
composition et leur granulométrie étaient semblables à celles des résidus et ils
n'étaient à peu près pas modifiés. Les analyses par FRX ont permis de proposer des
compositions minérales correspondant à la présence de diverses concentrations de
quartz, de plagioclases, de feldspath, de micas, de chlorite et de pyrite. Les
proportions les plus élevées de pyrite ont été trouvées dans les résidus et les
échantillons constitués surtout de résidus.
D'après les résultats de l'extraction séquentielle d'un échantillon constitué surtout
de résidus (poste 2), les métaux sont généralement peu disponibles et se retrouvent
la plupart du temps dans les phases oxydables et résiduelles. Ces observations sont
compatibles avec les fortes teneurs en sulfures trouvées dans les échantillons. Il
semblerait donc, en général, que les métaux sont non labiles et qu'il faudrait des
conditions fortement oxydantes et acides pour qu'il y ait libération de quantités
importantes de métaux. Les conditions qui prévalent dans le lac Anderson ne sont
pas propices à ce phénomène; par conséquent, on considère minimale la probabilité
que des teneurs toxiques en métaux passent des sediments au milieu aqueux.
Toutefois, le zinc est l'exception qui confirme la règle: en effet, étant donné les
fortes concentration de Zn total présentes, l'observation d'un dégagement de faibles
quantités de Zn dans les autres phases lors de l'extraction séquentielle indiquait la
possibilité de libération de quantités décelables dans les conditions naturelles. En
outre, de faibles quantités de cadmium, de cuivre, de plomb et de nickel étaient
aussi libérées ailleurs que dans les phases oxydables et résiduelles. Le bilan
acide-base des échantillons de résidus indiquait un fort potentiel générateur d'acide.
Le biote du lac fut étudié de façon fort détaillée. Les populations d'invertébrés
benthiques étaient peu denses, mais comparables à celles observées lors d'études
précédentes, tant au point de vue du nombre que des espèces qui les composaient.
D'après la densité et la structure des populations de phytoplancton, le lac serait
mésotrophe. L'examen des populations plus anciennes montre que des conditions
plus eutrophes ont existé avant la sédimentation des résidus. La densité du
zooplancton était fort variable, mais elle était généralement plus faible près des
dépôts de résidus. La diversité du zooplancton était comparable à celle observée
dans les autres lacs du Manitoba. On a dressé la carte de la végétation du lac et des
échantillons ont été prélevés pour fins de dosage des métaux. Les teneurs en
métaux en Typha étaient en général supérieures dans les zones d'infiltration des
résidus, en particulier dans le cas de l'arsenic, du cadmium, du plomb et du zinc. À
l' extérieur de ces zones, tous les métaux, à l'exception du nickel, étaient peu
concentrés. L'échantillonnage des poissons a confirmé la limitation des ressources,
car seules des épinoches à cinq épines (Culaea inconstans) furent capturées. En
outre, les teneurs en métaux étaient aussi notablement plus élevées chez les
poissons pêchés dans la zone de sédimentation des résidus.