En 1995, un projet conjoint a été entrepris au site de la mine Louvicourt, dans le
cadre du Programme de neutralisation des eaux de drainage dans l'environnement
minier, afin de démontrer l'efficacité de la déposition subaquatique des résidus
dans des structures de confinement artificielles sous de couvertures aqueuses peu
profondes. Le projet a été géré par Golder Associés qui agissait à titre de
consultants principaux avec Aur Ressources, le Centre canadien de la technologie
des minéraux et de l'énergie (CANMET), l'INRS-EAU (Université du Québec),
l'Université de la Colombie-Britannique, SENES Consultants et le Centre de
technologie Noranda. Le rôle de CANMET dans le projet était d'analyser, en
effectuant des études en colonnes, quatre scénarios de déposition subaquatique des
résidus qui pourraient éventuellement convenir au site de la mine Louvicourt,
lorsque celle-ci serait fermée.
Des échantillons de résidus prélevés sur une période d'un mois du circuit de
remblayage par le personnel de la mine Louvicourt ont été envoyés à CANMET.
Pendant l'expédition, ils étaient continuellement recouverts d'une couche d'eau de
traitement. On a transféré ces résidus sous forme d'une pulpe qu'on a ensuite laissé
précipiter comme couche de fond de quatre séries de trois colonnes identiques
(d'un diamètre intérieur de 0,3 m). Chaque série simulait un scénario différent pour
la déposition subaquatique. La configuration des colonnes était la suivante :
- Série 1 : couverture aqueuse de 0,3 m directement sur les résidus
- Série 2 : couverture aqueuse de 0,3 m sur une couche intermédiaire de
tourbe disposée sur les résidus - Série 3 : couverture aqueuse de 0,3 m sur une couche intermédiaire de sable
disposée sur les résidus - Série 4 : couverture aqueuse de 1,0 m sur les résidus
En d'autres mots, l'étude en colonnes visait à évaluer dans quelle mesure des
couches de deux épaisseurs (0,3 m et 1,0 m) et deux barrières intermédiaires
(tourbe et sable) permettaient de prévenir l'altération des résidus submergés. La
tourbe et le sable utilisés dans les études en colonnes étaient disponibles
localement et ont été prélevés sur la propriété de la mine Louvicourt par le
personnel de la mine. Afin de faciliter le remplacement de la couverture aqueuse
pendant l'étude, on a utilisé, au début, à la place de l'eau de traitement de la mine,
de l'eau non traitée provenant de la rivière des Outaouais.
L'étude en colonnes comportait deux phases principales. La phase I, qui s'est
étendue sur 200 jours, portait surtout sur la diffusion d'oxygène et les flux ioniques
dans une couverture aqueuse en circulation. Au cours des 100 premiers jours, l'eau
de la couverture aqueuse était en circulation, mais elle n'était pas aérée. Pendant les
100 derniers jours, la couverture aqueuse était en circulation et était aérée. Au
cours de la phase II, qui s'est étalée sur une période de 13 mois, il y a eu
précipitation, ruissellement et rabattement à des taux semblables à ceux observés
sur le terrain. On a étudié les répercussions de ces phénomènes sur la chimie de la
couverture aqueuse et des eaux interstitielles de chaque série de colonnes. On a, au
début de chaque phase, utilisé de nouveaux lots d'eau naturelle comme couvertures
aqueuses, de sorte que seule l'eau interstitielle de chaque colonne retenait les effets
résiduels de l'étape précédente de l'étude.
Les résultats de l'étude ont montré que, plus particulièrement pendant la phase I,
l'oxydation des sulfures, l'écoulement des sulfates à partir de l'eau interstitielle et
peut-être également la dissolution de quantités mineures de sulfures secondaires
ont contribué à l'augmentation de la teneur en sulfate de la couverture aqueuse
disposée directement sur les résidus. On a détecté, au cours de la phase I, une
faible baisse du pH dans la couverture aqueuse des colonnes avec de la tourbe et
avec du sable. Cette diminution pourrait résulter de l'acidification provoquée par
l'hydrolyse du Fe et du Mn près de l'interface eau/solide, et/ou de l'oxydation de
contaminants sulfurés piégés. Toutefois, après le lessivage initial des agents
d'altération accumulés, tant la tourbe que le sable constituaient une barrière de
diffusion efficace permettant de supprimer l'altération chimique des résidus
sous-jacents. La couverture aqueuse de 1,0 m sans couche intermédiaire semblait
plus efficace que la couverture aqueuse de 0,3 m pour freiner l'oxydation des
sulfures et la lixiviation des métaux dans les résidus submergés, dans des
conditions de laboratoire; ce phénomène est contrôlée en grande partie par le bilan
d'alcalinité dans les couvertures aqueuses. Quoi qu'il en soit, la précipitation des
oxyhydroxydes de fer à l'interface eau/résidus et le rabattement limitaient le flux de
métaux indésirables vers la colonne d'eau sus-jacente. Seules de faibles quantités
de zinc dissous diffusaient à partir de l'eau interstitielle des résidus vers la colonne
d'eau sus-jacente.
Il faut faire preuve de circonspection en extrapolant directement au site de la mine
Louvicourt les conclusions des études en colonnes, puisque ces dernières ont été
réalisées en laboratoire, c'est-à-dire dans des conditions fort différentes des
conditions observées sur le terrain. Parmi les travaux additionnels recommandés
pour compléter cette étude, on compte :
- La caractérisation des solides après les essais en colonnes afin de
confirmer les processus géochimiques qui sont survenus. - La corrélation des résultats des essais en colonnes avec les données
obtenues des parcelles expérimentales. - L'exécution d'essais lysimétriques sur les couvertures aqueuses de 1,0
m moins alcalines, afin de clarifier leur performance à long terme
dans des conditions bien oxygénées. - La détermination du taux d'appauvrissement en carbonate et de ses
conséquences à long terme dans les solides ayant fait l'objet d'essais.
Une bonne compréhension des processus physiques, chimiques et biologiques
importants et pertinents lors de la déposition subaquatique des résidus facilitera
l'élaboration de solutions pratiques ne nécessitant aucune intervention ultérieure
après la fermeture du site qui, comme la mine Louvicourt, utilisent la technologie
des couvertures aqueuses pour freiner l'oxydation de sulfures dans les résidus
réactifs.