L'étude a débuté en 1992 dans le but de régler certaines questions liées à la
conception des couvertures aqueuses utilisées pour la réhabilitation des résidus
oxydés. Des expériences de colonne en laboratoire et des essais en cellules de terrain
ont été réalisées pour des résidus provenant du site de la mine Mattabi (Noranda Inc.)
près d'Ignace (Ontario). Certaines des expériences comportaient la mise en place de
couches d'atténuation constituées de sable ou de tourbe à l'interface résidus-eau.
Contrairement à ce qui a été fait pour d'autres études, les résidus n'ont pas été
modifiés par l'ajout de matières alcalines, que ce soit avant ou après l'inondation.
Les avantages recherchés par la mise en place d'une couverture aqueuse sur des
résidus oxydés sont notamment (1) de freiner l'oxydation des résidus, (2) d'améliorer
suffisamment la qualité de la couverture aqueuse pour permettre une décharge des
eaux de ruissellement dans l'environnement immédiat sans avoir besoin d'effectuer un
traitement après la période de transition (période durant laquelle les produits de
l'oxydation antérieure sont libérés de la couverture aqueuse), et (3) de réduire la
charge de contaminants et les coûts du traitement associés aux eaux d'exfiltration
provenant des résidus avec le temps.
L'inondation des résidus oxydés sans installation préalable d'une couche d'atténuation
a donné lieu à la lixiviation de métaux et de sulfate provenant des eaux interstitielles et
de la phase minérale soluble dans la couverture aqueuse. Dans les colonnes, les
concentrations moyennes de fer total, de sulfate et de zinc dans la couverture aqueuse
étaient respectivement de 257 mg/L, de 927 mg/L et de 20,2 mg/L environ un an après
l'inondation. Les concentrations correspondantes dans la couverture aqueuse de la
cellule de terrain un an après l'inondation de juillet 1992 étaient de 466 mg/L, 2850
mg/L et 3,8 mg/L respectivement. Les différences entre les concentrations mesurées
en laboratoire et lors des essais sur le terrain sont probablement imputables aux
différences de composition initiale de l'eau interstitielle et de la teneur en minéraux
solubles entre les colonnes et la cellule d'essai.
Comme l'eau de porosité des résidus de Mattabi était riche en fer ferreux, la mise en
place de la couverture aqueuse a été accompagnée de la précipitation d'une mince
couche d'oxyde ferrique hydraté précipité à la surface des résidus. Ce phénomène est
causé par l'oxydation du fer ferreux par l'oxygène dissous et par l'hydrolyse
subséquente du fer ferrique.
Au fil du temps, les concentrations de contaminants dans la couverture aqueuse ont
diminué par suite 1) de la dilution de la couverture aqueuse causée par l'ajout d'eau
déionisée (colonnes de laboratoire) ou à cause de la précipitation et de l'eau provenant
de la fonte des neiges (cellule d'essai sur le terain), 2) du lessivage des solutés par
infiltration d'eau provenant de la couverture vers les résidus, et 3) de l'élimination de
certains métaux par précipitation et sorption sur une couche d'oxyde ferrique hydraté
précipité qui s'était formée à l'interface eau-résidus. Dans la cellule de terrain, la
couverture aqueuse a atteint régulièrement les limites de décharge réglementaires
deux ans après l'inondation : As < 0,5 mg/L, Cu < 0,3 mg/L, Fe < 3 mg/L, Pb < 0,2
mg/L et Zn < 0,5 g/L. Cependant, le pH de la couverture aqueuse est demeuré sous la
valeur minimale de 6,0. On a estimé à environ 1 855 mm la quantité d'eau qui s'est
infiltrée durant cette période. Dans les couvertures aqueuses de la colonne de
laboratoire, la concentration de zinc a diminué beaucoup plus lentement que dans la
cellule d'essai sur le terrain et était encore à ~6 mg/L après 620 jours d'infiltration
simulée, ce qui se traduit par ~955 de jours équivalents pour des vitesses d'infiltration
moyennes.
On peut expliquer le fait que les concentrations de zinc étaient encore élevées dans
les couvertures aqueuses de la colonne de laboratoire par la recherche d'un équilibre
géochimique entre la couche d'eau superficielle et la phase solide renfermant du zinc
et contenue dans la couche d'oxyde ferrique hydraté à l'interface eau-résidus. Ainsi,
l'oxyde ferrique précipité, bien qu'il ait contribué à diminuer la concentration de zinc
dans la colonne d'eau durant la première année des essais, a par la suite servi de
source de zinc soluble à mesure que les concentrations de métaux dans la couverture
aqueuse et dans l'eau interstitielle diminuaient. Dans la cellule de terrain, la teneur en
zinc de la couche de précipitat (0,22 %) était inférieure à celle des colonnes en
laboratoire (1,28 %), probablement à cause du fait que les concentrations initiales de
l'eau interstitielle étaient inférieures. Par conséquent, la lixiviation du zinc n'a pas été
aussi importante, et les limites de décharge ont été atteintes dans la couverture
aqueuse deux ans après la première inondation de la cellule, comme nous l'avons vu
précédemment. Ainsi, les caractéristiques géochimiques des résidus oxydés
(composition de l'eau interstitielle, minéraux solubles) ont une incidence importante sur
le temps requis pour atteindre les limites de décharge dans la couverture aqueuse.
Les couches d'atténuation constituées de sable ou de tourbe ont été mises à l'essai
seulement dans les colonnes en laboratoire. Les flux de métaux provenant des résidus
vers la couverture aqueuse ont été considérablement réduits par la mise en place
d'une couche d'atténuation à l'interface eau-résidus. Cela s'explique par le fait que la
diffusion des métaux provenant des résidus oxydés à travers la couche d'atténuation et
vers la couverture aqueuse est un processus très lent. En outre, la couche
d'atténuation exerce un contrôle sur la diffusion pour ce qui est de la disponibilité de
l'oxygène dissous vers les résidus et par conséquent, elle restreint l'oxydation
ultérieure des résidus plus efficacement qu'une simple couverture aqueuse.
Dans le cas où on a utilisé une couche de sable, la couverture aqueuse a atteint les
limites de décharge durant toute la durée des essais. Les concentrations moyennes de
fer, de sulfate et de zinc dans la couverture aqueuse étaient inférieures à 0,3 mg/L, 50
mg/L et 0,03 mg/L environ six mois après l'inondation. La couche de tourbe était moins
efficace à cause de sa propre teneur en zinc lixiviable : après les 163 premiers jours
de l'essai, la concentration de zinc était encore de 1,5 g/L dans une des colonnes. Par
conséquent, il est important de s'assurer que les matériaux employés pour aménager
la couche d'atténuation possèdent de faibles niveaux de contaminants, de sorte que la
couche ne contribue pas à contaminer la couverture aqueuse. Une caractérisation
attentive et détaillée de ces matériaux est donc très importante. De façon générale, la
tourbe obtenue à proximité de sites miniers ne semble pas être un matériau qui
convienne à l'aménagement des couches d'atténuation, car elle est souvent une
source de fer et d'autres métaux dans les applications de couverture aqueuse.
La qualité de l'eau d'exfiltration a été mesurée seulement dans les essais de colonne
en laboratoire. Les concentrations dans l'eau d'exfiltration étaient à l'origine très
élevées (semblables aux concentrations de l'eau interstitielle) et sont demeurées
stables dans toutes les colonnes d'eau jusqu'à ce que le front de déplacement ait
atteint le fond des colonnes (taux de renouvellement de l'eau du volume poreux
d'environ 0,7), après quoi elles ont diminué en fonction du temps à mesure que l'eau
qui s'infiltrait évacuait l'eau interstitielle contaminée. La présence d'une couverture
aqueuse a accéléré la diminution des concentrations dans l'eau d'exfiltration lorsqu'on
compare la présence de cette couche à des résidus exposés à l'atmosphère,
probablement par suite de la réduction subséquente de l'oxydation des résidus.
L'entretien à long terme des couvertures aqueuses exige généralement que les pertes
d'eaux d'exfiltration soient réduites au minimum. Dans ce cas, l'eau interstitielle
contaminée demeurera en place pendant de nombreuses années, et l'on peut
s'attendre à ce que le traitement des eaux d'exfiltration, s'il fait partie du plan de
fermeture, soit durable.
Si la vitesse d'écoulement des eaux d'exfiltration est élevée, comme c'était le cas
dans la présente étude, de grands volumes d'eaux devront être interceptés et traités.
Les considérations économiques laissent supposer qu'aux sites où les vitesses
d'écoulement des eaux d'exfiltration sont élevées, une couverture aqueuse ne pourrait
convenir que si elle est additionnée d'eau douce alimentée par gravité provenant d'une
source à proximité, et ainsi elle pourra compenser pour les pertes d'eaux d'exfiltration.
Dans ce cas, les coûts du traitement des eaux d'exfiltration augmenteront après
l'inondation à cause des vitesses d'infiltration élevées. Même si la qualité des eaux
d'exfiltration augmente avec le temps, le traitement pourrait être nécessaire à très long
terme parce que les concentrations d'éléments en solution peuvent atteindre des
valeurs près de l'asymptote qui se trouveraient encore au-dessus des limites de
décharge, comme ce fut le cas lors de certains essais. Ainsi, l'établissement d'une
couverture aqueuse sur les résidus oxydés n'est pas recommandé pour des sites où
les eaux d'exfiltration sont importantes.