La pyrite et la pyrrhotine sont les sulfures les plus abondants dans les déchets miniers
du monde entier. Bien qu'il existe un important corpus d'information relative à
l`altération de la pyrite et aux effets de ce phénomène sur la qualité de l'eau, on
connaît mal les réactions intervenant dans l`altération et les facteurs qui contrôlent le
taux de réaction de la pyrrhotine. Contrairement à la composition chimique de la pyrite,
celle de la pyrrhotine varie beaucoup comme l'indique la formule Fe1-xS où x peut
varier de 0 à 0,125. Ceci indique aussi une carence inhérente en fer dans la structure
cristalline, correspondant peut-être à une moins grande stabilité structurale que dans
le cas de la pyrite. La pyrrhotine se présente sous plusieurs formes cristallographiques
connues.
Les objectifs de ces travaux étaient les suivants:
- évaluer les facteurs cinétiques qui influencent l'oxydation de la
pyrrhotine; - étudier les effets de la structure cristalline, des impuretés de métal, de la
surface et de la catalyse bactérienne sur le taux d'oxydation; - évaluer la dynamique et les effets sur la qualité de l'eau de l'oxydation
de la pyrrhotine dans des études portant sur des colonnes de résidus; - élaborer une approche de modélisation qui concorde avec les
mécanismes et les facteurs de contrôle s'exerçant sur les réactions
d'oxydation de la pyrrhotine.
Cette étude a été réalisée en trois phases distinctes. La première phase consistait à
étudier de manière détaillée douze échantillons de pyrrhotine la cinétique chimique
fondamentale de l'oxydation par l'oxygène et l'ion ferrique. La deuxième phase
consistait à caractériser le concentré de pyrrhotine obtenu de Clarabell Mill
(Inco-Sudbury) et à en étudier la cinétique. On a étudié le concentré de pyrrhotine pour
évaluer la cinétique de l'oxydation dans différentes conditions de température, de pH et
de catalyse bactérienne. La troisième phase de l'étude consistait à tester des résidus
de pyrrhotine dans des colonnes conçues pour évaluer les effets de la teneur en
soufre (2 % à 6 % S2-), de l'inoculation bactérienne (Thiobacillus ferrooxidans), de la
présence de calcite (1 % CaCO3) et d'enstalite (5 % MgSiO3) comme solides
neutralisants, ainsi que de la présence de pyrrhotine à fine granulométrie (< 45 F m)
dans les résidus.
d'oxydation de la pyrite dans des conditions analogues. L'effet de la température était
analogue à celui qu'on observait pour l'oxydation de la pyrite avec des énergies
d'oxydation variant de 50 à 60 kJ mol-1. La structure cristallographique et la teneur en
métaux à l'état de traces n'avait pas d'effet important de manière soutenue.
L'effet de l'inoculation bactérienne variait en fonction du pH et de la température. Le
taux maximal de production biologique de sulfate a été observé à pH = 4; les taux
mesurés étaient à peu près 10 fois plus élevés que ceux qui avaient été observés dans
le cadre d'essais non biologiques. À pH 2 et 6, les taux non biologiques et les taux
biologiques étaient à peu près analogues. Les essais en colonne ont confirmé les
effets de l'activité bactérienne sur le taux d'oxydation : on a constaté un comportement
analogue dans une colonne inoculée et dans une colonne non inoculée. Le taux
d'oxydation et d'apport dans le cas du sulfate, du fer et du nickel étaient analogues
dans les deux colonnes renfermant 6 % S2-. Les taux d'apport dans le cas du sulfate
et du fer n'étaient que légèrement inférieurs dans la colonne renfermant 2 % S2-, mais
le taux de libération du nickel était supérieur par rapport à la colonne renfermant 6 %
S2-. Le taux de consommation de l'oxygène suivait le taux d'apport des produits
d'oxydation de la pyrrhotine. En général, le taux de consommation de l'oxygène était
initialement 3 à 10 fois plus élevé que le taux de production de sulfate, équivalent au
point de vue stoechiométrique, mais avec le temps, le taux de consommation
d'oxygène et le taux de libération de sulfate convergeaient. Le rapport molaire moyen
de Fe : SO 4 était d'environ 0,9 à 0,96, ce indique qu'en moyenne, l'oxydation de la
pyrrhotine produisait du Fe2+ et du SO42- de manière stoechiométrique.
La présence de calcite dans les résidus renfermant 6 % S2- donnait lieu à des taux de
consommation d'oxygène et de libération de sulfate analogues à ceux qui étaient
mesurés dans le cas des résidus ne contenant pas de carbonates. Toutefois, la calcite
assurait le maintien d'un pH presque neutre dans l'eau interstitielle, ce qui donnait des
taux de libération du Fe et du Ni beaucoup plus faibles. La présence d'enstatite, un
tampon de silicate, donnait à l'eau interstitielle un pH de 4 à 5 et faisait précipiter un
peu plus d'hydroxyde ferrique, ce qui faisait diminuer le taux de libération du nickel par
rapport au témoin. La différence entre les résidus tamponnés avec du carbonate et du
silicate était liée au pH de l'eau interstitielle, la colonne de carbonate maintenant un pH
à peu près neutre et provoquant la précipitation presque complète du fer.
Les résultats indiquent que des caractéristiques de la pyrrhotine comme la présence
d'impuretés métalliques et la forme cristallographique n'influent pas beaucoup sur le
taux d'oxydation. La surface des particules de pyrrhotine est de loin le paramètre le
plus important permettant d'évaluer le taux d'oxydation de la pyrrhotine dans les
résidus. Les résultats des essais effectués en colonne indiquent que le transport de
l'oxygène est le phénomène le plus important et que de petites incertitudes relatives à
la cinétique de la réaction n'influent pas beaucoup sur la prévision à long terme de
l'oxydation des résidus lorsqu'on tient compte à la fois de la cinétique et du transport
de masse de l'oxygène dans la modélisation géochimique.