L'effet nocif de l'eau acide produite par l'oxydation des résidus et des stériles par les sulfures sur l'environnement a été reconnu récemment et est combattu dans des régions méridionales du Canada. De nombreuses mines sont abandonnées, en exploitation ou projetées dans les régions de pergélisol du Canada. Ces mines septentrionales offrent un outil additionnel pour combattre la production d'acide : le gel des résidus et des stériles et leur maintien à l'état gelé. Il faut évaluer judicieusement cet outil pour déterminer comment et où l'utiliser de façon économique.
Le pergélisol n'est pas homogène et dépend grandement de la température annuelle moyenne de l'air et de la physiographie, lesquelles varient d'une région à l'autre du pays. Le pergélisol se divise en pergélisol discontinu au voisinage du 60e parallèle et en pergélisol continu dans la région de l'Arctique. La zone de pergélisol peut aussi se répartir selon les régions climatiques boréale, de la Cordillère et de l'Arctique. Le pergélisol discontinu se trouve dans les deux premières régions et le pergélisol continu dans la dernière.
La température annuelle moyenne du sol est d'environ 4 degrés Celsius plus élevée que la température annuelle moyenne de l'air. Toutefois, la température du sol près de la surface fluctue grandement au cours de l'année et les fluctuations sont moindres en profondeur. La température est constante à quelque 10 à 15 m sous la surface. Les fluctuations de température annuelles entraînent chaque année le dégel d'une couche de surface appelée la zone active. L'épaisseur de la zone active dans le pergélisol continu varie entre 0,5 m sous une épaisse couche organique et 10 m dans le roc dénudé. Dans le pergélisol discontinu, l'épaisseur de cette zone peut être plus grande. Pour un régime de température donné, l'épaisseur de la zone active dépend surtout de la valeur isolante de la couche organique, puis de la teneur en eau de la séquence stratigraphique sol/roc sous-jacente. La minéralogie de cette séquence stratigraphique sous-jacente est peu importante.
La production d'acide est le résultat de l'oxydation chimique et biologique de la pyrite. Les données disponibles et le modèle RATAP montrent que le taux d'oxydation diminue beaucoup lorsque la température tend vers zéro degré Celsius. Le taux relatif d'oxydation tombe à environ 10 % du taux relatif observé entre 25 et 3OoC. Toutefois, en-dessous de Oo C, le comportement du taux relatif est peu connu. De l'eau non gelée est observée en-dessous de OoC. Des études géotechniques ont révélé que l'eau gèle autour des grosses particules comme les particules de sable et de limon grossier. Autour des petites particules, une fine couche d'eau non gelée subsiste jusqu'à -5o C environ ou moins ¬selon le diamètre et la minéralogie des particules. Le volume d'eau non gelée est faible et entouré de glace. Dans le limon, à -3o C, l'eau non gelée représente moins de 10 % du poids total d'eau.
Les contrôles de température du bassin de résidus de la mine Lupin constituent une bonne base de données de température qui montre que la température du sol varie au cours de l'année dans plusieurs stratigraphies sol/résidus/roc. Ces données indiquent que l'épaisseur de la zone active se situe entre 2,5 et 3 m dans les tills et les résidus de sable limoneux natif. La zone active a une épaisseur de 1 m dans un sol naturel recouvert d'une couche organique de 500 mm, et de 4 m dans le roc fracturé et dénudé.
Les données de Lupin, qui proviennent d'un pergélisol continu, montrent que la couverture de sable et de gravier doit être de 3 m pour que les résidus ne comportent aucune zone active et demeurent gelés en permanence. Une couverture graveleuse de cette épaisseur est très coûteuse. Une solution plus économique dans les mines regorgeant de stériles serait une couverture de pierre abattue non acidogène. Une couverture plus mince permettrait aussi d'autres économies. Une solution plus économique consisterait à confiner complètement les eaux de surface dans le bassin de résidus en aménageant un périmètre d'endiguement dont l'intérieur de la masse serait gelé. Dans un tel aménagement, la base de la zone active sous la crête des digues se trouverait au-dessus du niveau des hautes eaux du bassin. Le matériau rapporté pourrait demeurer gelé en permanence si on augmentait la hauteur des digues ou si on enfouissait des panneaux isolant en polystyrène dans le remblai pour diminuer le remblayage.
Il serait possible de confiner toute l'eau de surface dans la plupart des régions de pergélisol continu ou discontinu parce que l'évaporation est chaque année supérieure aux précipitations dans le nord. Un tel aménagement exige que le bassin hydrographique soit limité au bassin de résidus et qu'un franc-bord soit mis en place pour emmagasiner l'eau pendant les périodes de fonte des neiges et de précipitation extrêmes.
Dans les régions de pergélisol discontinu, il peut s'avérer presque impossible de maintenir un pergélisol dans les résidus. Dans ce cas, un périmètre d'endiguement gelé peut être entretenu artificiellement pour assurer un confinement complet.
L'endiguement artificiel le plus pratique consiste à enfouir des thermosiphons et de l'isolant en polystyrène juste en-dessous de la surface du sol. Dans un tel aménagement, les thermosiphons, constitués de caloducs non mécaniques, extraient la chaleur du sol l'hiver et l'isolant empêche la chaleur d'entrer l'été. Des thermosiphons ont été utilisés en Alaska et au Canada dans la constructions de routes, d'aérodromes et d'immeubles.
Une solution d'appoint non éprouvée dans les régions de pergélisol discontinu consiste, non pas à maintenir artificiellement le pergélisol, mais à aménager une couverture de pierre convective. Le principe de la couverture de pierre repose sur l'extraction de haleur du sol l'hiver par convection d'air dans les gros interstices de la couverture et sur l'utilisation de ce même air comme couverture isolante l'été. Une étude a été documentée en Russie (Robertson et coll. 1982), et une analyse thermique a été effectuée sur des résidus d'uranium au Canada, à l'appui de ce principe. Il est recommandé de poursuivre l'analyse thermique de ce type d'aménagement et d'en faire l'installation sur le terrain à cause de sa simplicité.
Pour obtenir plus d'information et élaborer des principes d'aménagement concernant l'utilisation du pergélisol pour empêcher la production d'acide dans les résidus, il faudrait poursuivre les travaux en procédant à des analyses en laboratoire et de bureau sur l'oxydation par les sulfures au voisinage du point de congélation; à des analyses thermiques pour mieux estimer l'épaisseur des couvertures destinées à maintenir les résidus gelés; et à l'installation et au contrôle sur le terrain des aménagements recommandés dans des pergélisols continus et discontinus.