Lakefield Research Limited ont été retenu par Falconbridge Limited en août 1994 pour
la réalisation d'un programme d'essai. Ce programme visait à évaluer les effets de la
déposition subaquatique des résidus de pyrrhotine et des résidus miniers fins de
l'usine Strathcona sur la qualité de l'eau dans le système de traitement Upper
Strathcona. Les résultats du programme d'essai ont été utilisés pour déterminer s'il
était possible de limiter la production d'acide avec la déposition subaquatique des
résidus de l'usine Strathcona. Le programme d'essai comportait la caractérisation des
résidus et des essais sur colonne. Deux types de résidus ont été testés dans des
colonnes: des résidus de pyrrhotine et des résidus mixtes de l'usine Strathcona (50:30
pyrrhotine : schlamms fins).
L'eau du système de traitement Upper Strathcona était acide (pH 2,9), elle
présentait une conductivité élevée (2270 μmhos/cm) ainsi que des
concentrations élevées de sulfate (941 mg/L), de fer (6,9 mg/L) et de nickel
(2,1 mg/L). De l'eau prélevée en aval du système de traitement des résidus
Strathcona a été traitée et utilisée comme eau de traitement dans l'usine
Strathcona. Cette eau était alcaline (pH 7,4), présentait une conductivité
faible (1630 μmhos/cm) ainsi qu'une faible concentration de sulfate (542
mg/L), de fer (<0,02 mg/L) et de nickel (0,17 mg/L).
Les résidus de pyrrhotine employés dans le cadre du programme étaient surtout
constitués de pyrrhotine (92-95 %), avec des quantités plus faibles de magnétite et de
minéraux non opaques. Les schlamms fins étaient surtout constitués de minéraux non
opaques comme du quartz, de l'albite, de l'actinolite et du mica blanc.
Un balayage multi-éléments a mis en évidence la présence de métaux analogues dans
les résidus de pyrrhotine et dans les résidus mixtes de l'usine Strathcona (résidus SM).
Les résidus de pyrrhotine contenaient 30,2 % de soufre et 56 % de fer, alors que les
résidus SM renfermaient 19,0 % de soufre et 37 % de fer.
La portion liquide des résidus de pyrrhotine avait un pH de 7,9, alors que celle des
résidus SM présente un pH légèrement moins alcalin, de 6,8. Les portions liquides des
deux types de résidus se caractérisaient par une dureté élevée (3430-3790 mg/L), une
conductivité élevée (5354-5550 μmhos/cm), des concentrations élevées de soufre
(2810-3180 mg/L), de sulfate (991-1129 mg/L), de thiosulfate (1882-2761 mg/L sous
forme de sulfate) et de calcium (1290-1480 mg/L). Pour chacun de ces paramètres, les
valeurs les plus élevées ont été mesurées dans la portion liquide des résidus de
pyrrhotine et les valeurs plus faibles, dans la portion liquide des résidus SM. On n'a
pas décelé des concentrations d'aluminium, de cobalt, de cuivre, de fer, de plomb ni de
zinc dans les liquides des deux types de résidus, en quantité supérieure au seuil de
détection de la méthode.
Les essais de lixiviation sur colonne ont été effectués avec des résidus de pyrrhotine
et des résidus SM, ainsi qu'avec un influent constitué d'eau provenant du système de
traitement Upper Strathcona. Les résultats ont montré que le cuivre, le cobalt, le zinc,
le nickel, le plomb et l'aluminium étaient éliminés de l'influent et retenus par les résidus
alors que le fer, le calcium, le magnésium, le manganèse, le silicium, le potassium, le
sodium et le sulfate étaient libérés des résidus. Le pH de l'effluent est resté supérieur à
5.
Cinq colonnes pilotes à moitié remplies de résidus et surmontées d'une colonne d'eau
ont été surveillées au cours d'une période de 13 mois. On a cherché à évaluer les
effets des résidus immergés sur une couche d'eau superficielle stagnante acide. Les
cinq colonnes testées contenaient les couches suivantes: de l'eau provenant du
système de traitement Upper Strathcona sur 1) pyrrhotine, 2) résidus épaissis SM, 3)
pyrrhotite recouverte de 10 cm de substrat organique prélevée dans le système de
traitement, 4) pyrrhotite épaissie et 5) résidus de l'usine Strathcona. Les conclusions
suivantes sont basées sur les données recueillies à partir des cinq colonnes pilotes
pendant la période de 13 mois:
- Une couverture d'eau stagnante de 1000 mm permet de maintenir les résidus sous-jacents
à l'état réducteur. - On a observé l'existence d'un gradient de conductivité entre la couche de résidus et la
couche d'eau, ce qui a fait diffuser les sels vers le haut, dans la colonne d'eau. - Une augmentation du pH de 3,0 à presque 6,0 a uniquement été notée dans la couche
d'eau de la colonne de résidus de pyrrhotine épaissis et de la colonne de résidus de
pyrrhotine avec substrat. Le pH de la couche d'eau dans les trois autres colonnes s'est
maintenu à 3,0 environ. - La concentration de fer dans la couche d'eau de toutes les colonnes diminuait avec le
temps. Cette diminution était due à la précipitation des oxydes ferriques
hydratés. - La concentration de nickel dans la couche d'eau restait analogue à la
concentration de nickel mesurée initialement dans l'eau du système de
traitement Upper Strathcona (2,08 mg/L) dans toutes les colonnes, sauf dans la
colonne de résidus SM. La concentration de nickel dans l'eau recouvrant les
résidus SM a augmenté jusqu'à 3,2 mg/L. La concentration de nickel dans l'eau
interstitielle des résidus de toutes les colonnes était inférieure à 0,2 mg/L. - La concentration de sulfate dans l'eau recouvrant la colonne de résidus de
pyrrhotine épaissis s'est maintenue à environ 500 mg/L. La concentration de
sulfate dans la couverture d'eau des quatre colonnes restantes est restée à
environ 1000 mg/L. Il y avait un gradient de concentration des sulfates entre les
résidus et la couverture d'eau dans toutes les colonnes, ce qui peut donner lieu à
la diffusion des sulfates des résidus vers la couverture d'eau. - L'augmentation de la concentration de fer et de sulfate dans l'eau interstitielle
des résidus et de celle de nickel dans la couverture d'eau de la colonne des
résidus SM peut être attribuée à des changements du potentiel rédox (de
réducteur à oxydant) à l'interface. - La formation de précipités et d'une couche de croissance biologique à l'interface,
ainsi que la consolidation des résidus peuvent avoir contribué à la diminution
observée de la diffusion des sels provenant des résidus dans la couverture d'eau
à un stade plus avancé du programme d'essai.
D'après les données recueillies jusqu'à présent, on a conclu que la déposition
subaquatique des résidus de pyrrhotine, et leur recouvrement avec une mince couche
de substrat de sédiments provenant du système de traitement Upper Strathcona,
constituerait le scénario le plus efficace pour réduire la production d'acide. Il faudra
étudier des méthodes favorisant la formation rapide du substrat riche en matière
organique .
Comme l'essai d'immersion en colonne a été conçu pour simuler la déposition de
résidus frais au-dessus du chemocline et du thermocline dans des eaux acides peu
profondes, ses résultats ont permis de mieux expliquer les impacts du pire cas auquel
on peut s'attendre sur le système de traitement des résidus de Strathcona. Les études
effectuées dans le cadre d'une étude parallèle par Rescan sur le système de
traitement des résidus donnent à penser que les résidus sulfureux devraient être très
stables au fond du système de traitement des résidus de Strathcona. Cette stabilité
serait due à des concentrations élevées de matière organique dans les sédiments, à la
présence d'une grande quantité de sulfates dans la colonne d'eau pouvant servir à la
réduction, à une anoxie au fond de l'eau, à la réduction des sulfates et à la production
d'alcalinité.
Les résultats des essais effectués jusqu'à maintenant montrent que dans des
conditions statiques, les principaux processus agissant sur les colonnes de résidus et
d'eau sont la diffusion moléculaire et la précipitation. Il faudra donc très longtemps
avant d'atteindre l'équilibre dans les colonnes. On a avancé que la poursuite de la
surveillance des colonnes pourrait se révéler utile à la prévision des impacts à long
terme.
La modélisation géochimique des données existantes est recommandée pour faciliter
l'interprétation des données observées et pour aider à expliquer la précipitation des
oxydes ferriques hydratés ainsi que le changement des concentrations de métal avec
le pH. Des examens microbiologiques sont aussi recommandés pour identifier les
micro-organismes présents et pour déterminer quel rôle ils jouent dans la libération et
dans la mobilisation des métaux.