SOMMAIRE
Le programme d'Évaluation des Techniques de Mesures d'Impacts en Milieu Aquatique (ÉTIMA) a été mis sur pied afin d'assister l'industrie minière canadienne dans la sélection de techniques efficaces et peu coûteuses pour la surveillance environnementale («biomonitoring») des effets des métaux toxiques en milieu naturel. Le programme est géré par le Centre canadien de la technologie des minéraux et de l'énergie (CANMET). Le présent rapport constitue une évaluation technique des méthodes de surveillance environnementale utilisant les macrophytes, le phytoplankton et le périphyton pour mesurer les impacts des effluents miniers sur I' environnement aquatique.
Une large revue de la littérature concernant les macrophytes, le phytoplancton ainsi que le périphyton comme organismes sentinelles d'environnements contaminés par les métaux, y compris ceux entourant les sites miniers, est rapportée. Une évaluation critique des méthodes de surveillance environnementale utilisées est ensuite réalisée, et d'autres méthodes potentielles, mais n'ayant encore fait l'objet d'aucune étude de terrain, sont identifiées.
Les macrophytes présentent un potentiel intéressant comme organismes sentinelles afin de mesurer les impacts des effluents miniers sur l'environnement aquatique. Leur utilisation a été sous-estimée jusqu'à présent. Plusieurs espèces de macrophytes se conforment à plusieurs des critères énumérés auquel doit répondre un organisme sentinelle «idéal» : elles sont sédentaires, visibles à l'œil nu, faciles à échantillonner et à manipuler, elles concentrent les métaux dans leurs tissus et réflètent la contamination environnementale. Les concentrations en métaux retrouvés dans les tissus d'espèces de macrophytes enracinés submergés réflètent les concentrations biodisponibles d'ions libres dans les eaux interstitielles des sédiments, ainsi que la contamination possible de la colonne d'eau. Quelle partie de la plante utiliser, des méthodes afin d'enlever la contamination possible sur les racines et les parties vertes ainsi que pour réduire la variabilité des résultats sont discutés. Même si les indicateurs biochimiques de stress (comme les phytochélatines et l'activité enzymatique, principalement de la peroxidase) n'ont pas encore été utilisés chez les macrophytes comme moyen de surveillance environnementale sur le terrain, le potentiel qu'ils représentent est brièvement rapporté. D'autres études sur le terrain, effectuées à I'extérieur du programme ÉTIMA, seraient nécessaires avant que l'usage routinier des macrophytes comme organismes sentinelles soit applicable en milieu minier. Il serait intéressant d'échantillonner et d'analyser pour les métaux des espèces de macrophytes enracinés submergés récoltées avec d'autres organismes sentinelles benthiques plus fréquemment utilisés comme organismes sentinelles d'environnements contaminés, tels que les insectes aquatiques et les mollusques, et d'estimer à tous les sites d'échantillonnage les concentrations d'ions libres des métaux à l'interface sédiment/eau, lesquelles représentent le meilleur indice de la partie biodisponible des métaux totaux pour ces organismes, et alors de comparer l'utilité des macrophytes avec celle des autres organismes sentinelles «standards». Pour le milieu minier canadien, Eriocaulon septangulare, Eleocharis acicularis et Potamogeton richardsonii semblent être des candidats prometteurs à titre d'organismes bioindicateurs.
Étant donné que le phytoplancton répond bien aux changements de la qualité des eaux et qu'il se situe à la base de la chaîne trophique, il peut servir comme un outil efficace et significatif pour le suivi biologique. Jusqu'ici, seulement des méthodes basées sur les changements de biomasse et d'espèces ont été utilisées pour la surveillance environnementale des sites miniers. Cette revue de littérature a permis d'identifier plusieurs approches qui pourraient être plus puissantes que les traditionnelles: 1) analyse canonique de la communauté, 2) distribution en taille, 3) analyse des pigments, 4) dosage des phytochélatines, 5) difformité des diatomés, et 6) test basé sur la tolérance induite des communautés. Toutes ces approches doivent être vérifiées pour tester leur applicabilité et leur généralité. Le potentiel et les limites de ces techniques en vue de leur intégration dans un programme de surveillance environnementale sont discutés.
Dans les écosystèmes aquatiques, l'importance des communautés périphytiques est largement reconnue. Le périphyton constitue un système fonctionnel où se déroulent des processus autotrophes et hétérotrophes. Il joue le rôle d'interface entre le substrat et l'eau environnante. Cette communauté peut donc influer sur les voies biogéochimiques et sur la dynamique de l'ensemble de l'écosystème. Pour l'étude de perturbations environnementales résultant de la présence d'effluents miniers, le périphyton représente plusieurs avantages. Étant fixé, il est relativement facile à échantillonner et intègre les effets des variables de l'environnement. De plus, il montre un temps de réponse court aux perturbations qui peuvent provoquer des modifications de la structure et du fonctionnement de ces communautés. Par ailleurs, même lors de perturbations très sévères, le périphyton ne disparaît jamais complètement.
Cependant, les communautés périphytiques sont fortement influencées par la variabilité des conditions physiques du milieu. De plus, la complexité et l'hétérogénéité de cette communauté, ainsi que l'absence d'une standardisation méthodologique, limitent encore son utilisation dans les études d'impact des effluents miniers et expliquent que le périphyton ait été moins étudié que le phytoplankton. La revue de littérature a cependant fait ressortir l'intérêt des études sur les changements d’espèces ou de leur abondance relative et de leur distribution. En effet, la structure de la communauté périphytique reflète la capacité compétitive des espèces qui la composent et peut donc fournir une source d'informations intégrées pouvant servir d'indicateur sensible à la présence des métaux.